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20/02/2015

Profanation de Sarre-Union : le diagnostic d'un rabbin

 Ces jeunes "vivent dans un monde virtuel et autocentré" : 

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La profanation du cimetière juif de Sarre-Union est-elle un symptôme de société ? « Cet acte est représentatif de l'incapacité pour les jeunes d'entrevoir un avant eux-mêmes. Ils vivent dans un monde virtuel et autocentré. Il n'y a qu'eux, le présent [...] En cela, c'est emblématique d'une époque. » 

L'auteur de ce diagnostic n'est pas de ceux qui voudraient « relativiser l'antisémitisme » : c'est le rabbin Claude Heymann, adjoint au grand rabbin de Strasbourg. On trouve sa déclaration dans la page du Monde* intitulée sur six colonnes : « L'antisémitisme impulsif de cinq gars ordinaires ».   

Le mot « impulsif » n'est pas là par hasard. Si les « cinq gars » sont allés dans le cimetière juif de Sarre-Union, ce n'est pas sous la motion d'un atavisme idéologique. Leurs parents, dont plusieurs appartiennent à l'Education nationale, n'ont rien à voir avec des nostalgiques de la Westmark** nationale-socialiste. La justice, selon Le Monde, ne leur connaît pas « de convictions idéologiques qui pourraient expliquer leur comportement ». Non seulement ça, mais le leader apparent des cinq garçons, Pierre B., était connu pour son militantisme « antifa » : « Il portait des slogans antifascistes sur ses vêtements. "On ne parlait pas politique, mais si on évoquait le FN, il se mettait sur ses deux pattes arrières et se mettait à grogner. Il prétendait se battre contre le fascisme et était très remonté contre la police. Il traitait les militaires et les policiers de fascistes, avec une hargne qui mettait mal à l'aise..." », raconte un de ses camarades de lycée.  

Alors que s'est-il passé ce jour-là, dans le cimetière ? Notre première hypothèse et le diagnostic du rabbin Heymann semblent confirmés par le récit du Monde : « Dans l'après-midi du jeudi 12 février, les cinq garçons se trouvent une occupation pendant leurs vacances scolaires : aller au cimetière juif. Ils commencent à jouer, et là, selon le procureur de Saverne, "le jeu a dérapé". Un premier acte déclenche "une sorte de frénésie collective". Les stèles sont lourdes, mais anciennes et fragile : ils les cassent une à une. Ils font des saluts nazis, etc. »  

Pourquoi font-ils ça, puisque rien dans leurs antécédents n'est antisémite ? L'article du Monde parle d'antisémitisme « impulsif ». Mais « impulsif » est un mot étrange, un amalgame imprécis de psychologie et d'idéologie. Que veut-il dire ? La judéophobie serait-elle un gène, capable de s'activer à l'improviste et de coloniser en une fraction de seconde même l'esprit d'un antifa ? C'est peu probable.

Il y a une autre hypothèse. Le récit du Monde semble la proposer en pointillé en usant d'un vocabulaire évocateur : il parle d'un « jeu », suivi d'un « dérapage » en forme de « frénésie collective ».

Quel « jeu » peut-on aller jouer dans un cimetière désert ? Un jeu de rôles. (Morbide et inspiré de vidéos, comme presque tous).

Qu'est-ce qui peut faire basculer le jeu morbide vers ce passage à l'acte - décrit comme hallucinatoire - que le journal qualifie de « dérapage frénétique » ? un psychotrope ?

C'est ce que le récit paraît suggérer.  

Evidemment aucun de nos journaux ne va incriminer ouvertement les jeux vidéos, commerce qui « booste la croissance économique » ; ni les psychotropes, dont le commerce est désormais incorporé au PIB. 

 L'hypothèse du jeu de rôles et du psychotrope est peut-être inexacte. Mais elle expliquerait les aspects incohérents de cette affaire. En effet, dans un jeu de ce type, « jouer » le rôle du nazi n'est pas « être » nazi. Pas plus que jouer le rôle d'Altaïr (Assassin's Creed) n'est « être » Altaïr. Jouer le rôle du nazi implique même de proférer des cris nazis  rituels : « en guise d'accompagnement sonore », souligne Le Monde de façon révélatrice... Où les cinq garçons sont-ils allés chercher ces cris qui ne sont plus proférés nulle part (sauf à Kiev et à Vinnitsia) ? Ils les ont empruntés au nazisme de cinéma, spectacle de masse inlassablement rediffusé depuis des années. 

Si la profanation du cimetière de Sarre-Union a été le dérapage d'un jeu de rôles, c'était un jeu pathologique : objectivement, par les actes induits ; et subjectivement, dans la mesure où : 1. il impliquait une absence de discernement moral de la part des joueurs ; 2. il supposait un dédoublement de leur moi, scindé en un moi « normal » et un moi « acteur ». Pierre B., antifa dans son état normal, ne ment peut-être pas aux policiers et au juge en déclarant ne pas être antisémite dans la vraie vie... (A supposer qu'être antifa ne soit pas, aussi, un jeu de rôles). 

Les profanateurs de Carpentras (1990) étaient de véritables judéophobes : ils se rendirent pas à la police. Les cinq lycéens de Sarre-Union se sont présentés d'eux-mêmes aux policiers. Ils étaient paniqués de voir leur délire devenir une réalité publique. Quand on vit « dans un monde virtuel et autocentré », comme dit Claude Heymann, les retours au réel peuvent-être douloureux. Mais quelle est cette société qui pousse les jeunes à vivre dans le virtuel ? 

 

_______________ 

* 20/02. 

** Gau Westmark, « pays de la Marche de l'Ouest » : subdivision administrative Sarre-Moselle-Palatinat, de 1940 à 1945.  

 

16:48 Publié dans Idées, Société | Lien permanent | Commentaires (15) | Tags : idées

Commentaires

PAS TOUT À FAIT

> Le rabbin Heymann n'a pas l'air tout à fait sur la même longueur d'ondes que François Hollande.
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Écrit par : Nati / | 20/02/2015

> c'est que le rabbin a l'air de s'intéresser au monde moderne.
Quand Hollande parle, on a l'impression d'entendre un débatteur à la radio des années 1990.
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Écrit par : jean-eudes / | 20/02/2015

LA MORT

> « Jouer » avec des sépultures, ce n’est pas neutre ; il y avait sans doute aussi, chez ces jeunes, en se livrant à des profanations, le désir de surmonter leur peur de la mort.
Sauf que des gens normaux ne confondront pas le symbolique et le réel : ils puiseront dans leur imagination personnelle, dans la littérature, le cinéma, la peinture, etc. le moyen de se confronter à la dureté de notre destinée commune.
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Écrit par : Blaise / | 20/02/2015

PARENTS IRRESPONSABLES

> Mon filleul de dix ans me remercie avec un sourire gentil mais condescendant de la bd de Jean- François Kieffer que je lui ai offerte : "C'est mignon". Il m'explique qu'il préfère "Seuls", bd sans fin racontant l'histoire d'enfants morts-vivants avec ce qu'il faut de réactions enfantines et de violence crue (meurtres entre enfants, esclavage, sociétés s'inspirant du nazisme).
Je trouve ça inquiétant et j'en parle aux parents. La mère est un peu gênée d'apprendre ce qu'il y a dedans : elle en a acheté plusieurs épisodes sans regarder, pour la seule raison que "Ça lui plaît." Le père me dit que ce ne sont que des histoires, que ça ne peut pas lui faire de mal puisqu'il aime ça, et puis "La Bible est bien pire" (il n'a bien sûr jamais mis le nez dedans mais il connaît bien le mantra du jour : "Les religions, c'est l'horreur absolue").
Je n'arrive pas à lui faire comprendre que, quand les enfants n'ont que ça pour se construire un monde symbolique, cela peut finir par fonctionner comme une idolâtrie barbare de la violence.
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Écrit par : Guadet / | 20/02/2015

MANAUDOU

> Cela me fait rappeler que Laure Manaudou avait déclaré aux médias spontanément que s'il n'y avait pas de jeux vidéos, il y aurait moins de violence, il y a quelques années. Qu'avait dit cette jeune femme qui n'a que ses bras pour nager d'après les critiques de nos médias !
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Écrit par : Arnaud Le Bour / | 20/02/2015

"JEU"

> Je pense que ce sont effectivement des jeunes très immatures. Ils ont joué un jeu de rôle basé sur les jeux vidéo dont ils sont abreuvés. Au cours de ce jeu, ils ont accidentellement détérioré un monument et après leur est venue l'envie de casser pour casser, afin de montrer leur force physique, pas besoin de psychotrope pour cela.
Les architectes vous diront qu'il faut bâtir des cloisons plus solides dans les collèges que dans les lycées sinon les jeunes les démolissent. Pensez aussi aux jeux de massacre, si prisés dans les foires au plaisir d'autrefois, où il ne fallait pas seulement de l'habileté pour atteindre la cible mais aussi de la force physique pour que la balle d'étoupe la fasse choir.
Dans l'esprit des jeunes, ce vieux cimetière était l'équivalent d'une vieille ruine abandonnée : personne ne s'en souciait. Quel électrochoc quand ils ont pris conscience qu'il n'en était rien.
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Écrit par : Bernadette / | 20/02/2015

JEUX DE RÔLE

> En tant que rôliste (trop) occasionnel, je pense qu'une petite clarification sur les jeux de rôles seraient de bon aloi, de crainte qu'on ne retrempe les pieds dans la psychose des années 90 (en France, mais les États-Unis en ont connu une aussi un peu plus tôt et pour des motifs assez différents.
Grosso modo, les Français y voyaient un phénomène sectaire, les Américains y voyaient un piège satanique. J'ai entendu des évangéliques français me la sortir, ce qui m'a doucement fait sourire ; moins quand leur ire inquisitrice est allé jusqu'à soupçonner J.R.R. Tolkien d'être un occultiste et un néo-païen...)

Il en existe trois types, les jeux de rôles sur table tout d'abord (qui sont, en fait, un type bien particulier de jeux de société ; Donjons & Dragons est le plus connu), les jeux de rôles grandeur nature (appelés GN chez nous et LARP chez les anglophones) et les jeux de rôles informatiques (un des genres du jeu vidéo), mais ces derniers ne rentrent pas dans mon explication. Le principe du jeu repose sur une histoire (ou scénario), dont les personnages principaux sont incarnés par les joueurs. Le but est pour les joueurs d'arriver à la fin de l'histoire et, par l'imprévisibilité de leurs décisions, de contribuer à façonner cette histoire. Pour que ça fonctionne, il faut qu'un des joueurs sont un "meneur de jeu", qui raconte l'histoire et arbitre les actions et les décisions des joueurs (en gros, les meneurs jouent l'univers, puisqu'in fine ce sont eux qui donnent les conséquences des décisions des joueurs. Si un joueur veut que son personnage crochète une serrure, c'est le meneur, aidé des règles, qui va dire si ça marche ou pas). Pour le jeu sur table, les personnages n'existent que sur le papier (essentiellement en tant qu'ensembles de données qui détaillent ce qu'ils sont capables de faire ou pas, et dans l'imagination des joueurs, et l'univers est simulé par des règles (qui sont détaillées dans le manuel du jeu). Pour le grandeur nature, c'est différent, les joueurs mettent des costumes et vont tout faire eux-mêmes, ce qui fait ressembler le tout à un vaste théâtre d'improvisation bizarroïde. Le grandeur nature est le type le moins pratiqué (ça implique généralement beaucoup de monde et c'est une organisation assez lourde) mais le plus connu parce que, bon, des gugusses avec des armures en plastique et des épées en mousse, c'est visuellement plus intéressant que six mecs autour d'une table chargée de livres (des manuels qu'on va acheter dans des librairies spécialisées), de papier, de dés icosaédriques et de bouteilles de Coca tiède (ça, c'est le type le plus commun de jeu, que je pratique moi-même à l'occasion).
Que nos profanateurs à la petite semaine aient été influencés par les jeux vidéos et la culture "zombie" (après les vampires dans les années 90, les zombies dans les années 2000 et jusqu'à maintenant), je veux bien, mais par le vrai jeu de rôle (qui est déjà marginal et requiert une certaine assiduité, une certaine discipline pour sa pratique), ça me paraît assez improbable.

Sinon, dans le genre "créature improbable", quelque part entre le lapin-garou et le chat transquantique, un genre de "nazi antifasciste" a été répertorié par l'historien Simon Epstein, qui nous livre dans "Un paradoxe française : antiracistes dans la Collaboration, antisémites dans la Résistance" ce portrait de certains ultras de la Collaboration:
"Le collaborationnisme extrême, quant à lui, comprend de nombreux nazis, ou pro-nazis, qui ne sont pas fascistes, et pour qui la route du nazisme, ou du pro-nazisme, n'est jamais passée, de près ou de loin, par le fascisme. Jean Luchaire, Fernand de Brinon et Alphonse de Châteaubriant sont là pour le prouver.(...) Ils sont germanophiles, ils sont hitlériens comme peu d'autres en France, et même en Europe occupée, l'ont été. Et il ne sont pas fascistes. Ils ne l'étaient pas avant la guerre et ils ne le sont pas pendant. Ils ne sont pas fascistes d'origine, il ne le sont pas d'"imprégnation".(...) Ils sont pacifistes avant toute chose, et n'ont cessé de croire avec engouement, avec candeur, tout au long de leur chemin, à la réconciliation franco-allemande : une réconciliation qui se voulait magnanime, aux temps de Briand ; une réconciliation qui se concevait paritaire, dans les années 1930 ; une réconciliation qui se mendie au vainqueur, après 1940. C'est le pacifisme qui a dicté leur route. C'est le pacifisme, ce n'est pas le fascisme, qui les a conduits vers Hitler."

Même si les étiquettes sont complètement brouillées avec nos profanateurs ("fasciste" semble se confondre avec l'autorité légitime), encore plus qu'avec nos ultras de la Collaboration il y a 75 ans, ce ne serait en tout cas pas la première fois qu'on verrait le mariage idéologique de la carpe et du lapin...

Dr Zurui


[ PP à Dr Z. - Merci de donner ces précisions à nos lecteurs ! Bien entendu, si jeu de rôles il y a eu à Sarre-Union, ce n'est pas sous la forme perfectionniste que vous évoquez : mais plutôt sous une forme grossière - agrémentée de psychotrope qui a déclenché le basculement. Mais tout ça reste à prouver, comme je l'ai dit... Je n'ai fait que développer une hypothèse, qui n'a que le mérite d'être la seule à cadrer avec les personnes et avec les faits. On verra la suite. ]

réponse au commentaire

Écrit par : Dr. Zurui / | 20/02/2015

CAISSE

> On parle de pierres renversées ou brisées, bien, c'est une chose, mais les bambins ont-ils seulement eu l'envie de fouiller, creuser la terre, mettre la main à la pâte pour tomber sur un os ... un crâne ! Curiosité "légitime" , vraiment ... il n'y a plus d'enfants , y a-t-il seulement encore des parents , pour payer les pots cassés ? Aux industriels du virtuel et du morbide de s'expliquer et de passer à la caisse !
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Écrit par : escargolibri / | 21/02/2015

@ PP

> Vous me paraissez vouloir trop expliquer les pathologies sociales par les jeux vidéo. C’est un thème qui revient constamment dans vos posts.
Bien sûr, de tels jeux – comme d’autres jeux – peuvent se transformer en addiction chez l’usager (rien de nouveau sous le soleil : il suffit de lire "24h de la vie d’une femme" pour s’en convaincre) ; bien sûr, la famille des jeux vidéos simulant des combats hyperréalistes a des effets nocifs sur le système nerveux de celui qui s’y adonne, sur sa capacité de concentration et la qualité de sa relation avec son entourage. Bien sûr, bien sûr. Mais cela n’en fait pas une cause première de la désocialisation, et de la perte de contact des jeunes avec le réel. Il s’agit plutôt d’un symptôme, du signe que quelque chose ne tourne pas rond chez l’enfant ou l’ado. Qu’il a besoin d’être secouru.

Blaise


[ PP à Blaise
- Non, le sujet des jeux vidéo ne revient pas "constamment" sur ce blog. Il est même assez rare. Mais quand l'actualité commande d'en parler, pourquoi l'éviter ? La presse quotidienne a signalé que les cinq lycéens avaient ce profil. Ils sont allés au cimetière pour "jouer", reconnaît 'Le Monde'... De toute évidence, il s'agissait d'un "jeu" correspondant à l'univers des jeux de rôles.
- Pourquoi ne pas reconnaître que le Net exerce un effet de masse décisif sur les mentalités et les comportements, en particulier chez les adolescents ?
- Bien entendu la carence éducative (parentale et scolaire) crée le vide que le Net vient occuper ; ce sont les deux aspects du problème. Tenons compte des deux. ]

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Écrit par : Blaise / | 21/02/2015

JEUX

> Effectivement, les jeux vidéo façonnent l'imaginaire des enfants et des jeunes, et cela retentit sur les jeux de rôle. Qui ne sont pas une invention de l'époque moderne.
Ce qui change, c'est qu'autrefois, seuls les enfants s'y adonnaient. Il faut dire qu'on devenait rapidement adulte, avec des responsabilités.
Dans notre jeunesse, c'était le cinéma, puis la télé qui avaient une influence. Les enfants jouaient aux cow-boys et aux indiens, aux chevaliers, aux gendarmes et aux voleurs, à l'attaque de la diligence... Ce qui pouvait malgré tout avoir des conséquences funestes. J'ai eu connaissance d'un enfant ayant eu l'œil crevé par une flèche taillée dans une branche de haie.
La nature humaine n'a pas changé. Mais l'environnement dans lequel nous évoluons, si. Et cela a des conséquences.
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Écrit par : Bernadette / | 21/02/2015

ENFANTS LAISSÉS DANS L'IGNORANCE

> Les enfants d'aujourd'hui reçoivent rarement une instruction religieuse et sont laissés très ignorants de ce qu'a pu apporter la civilisation européenne.
J'accompagne des enfants dans leur scolarité entre la maternelle et le collège et je suis frappé de voir comment on en fait de bons techniciens mais pas des personnes cultivées et responsables.
Le passé leur est présenté de telle façon qu'ils voient son héritage comme une vieillerie inutile. Tout ce qu'ils entendent du discours politique ou des intellectuels de médias les confirme dans cette idée.
Résultat : leur indispensable construction à un niveau symbolique se fait par toute une sous-culture de jeux vidéos, de bd, de littérature "heroic fantasy" qui finit par constituer leur base de compréhension et d'action dans le monde.
Et la violence de cette sous-culture réapparaîtra forcément quelque part chez eux.
L'homme agit rarement par réflexion et plus par obéissance à des structures d'appréhension du monde construites par la mémoire des symboles rencontrés.
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Écrit par : Guadet / | 21/02/2015

FACETTES

> De l'eau à votre moulin, Patrice (je partage aussi votre diagnostic et vos convictions, comme Bertrand Vergely que vous connaissez bien, je crois, et sans doute pas mal d'autres).
http://www.atlantico.fr/decryptage/et-obsession-pour-selfies-departs-pour-syrie-ou-profanations-cimetieres-etaient-differentes-facettes-meme-mal-suicide-europe-2014774.html
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Écrit par : Aventin / | 22/02/2015

RÔLISTES

> Merci à Dr Zurui qui a bien recadré les choses (étant moi-même rôliste occasionnel).
Egalement joueur (occasionnel) de jeux vidéos, je trouve que leur place est tout à fait présente ici : Patrice en parle sans excès (et les questions posées, nuancées en fin d'article, sont, de façon heureuse, explicitées dans les commentaires).
Même si l'attaque ad hominem contre JRR Tolkien ou le Seigneur des Anneaux, comme j'ai pu la lire dans le commentaire d'évangile du dernier Famille Chrétienne, par exemple, me fait bondir, je dois reconnaître que l'oeuvre a été la porte d'entrée d'un courant (de plus en plus fort) d'oeuvres de fantasy/science fiction/uchronie partagé en 2 tendances :
- une tendance franchement manichéenne (et donc théologiquement hérétique et philosophiquement déraisonnable), où l'on est amené à pouvoir choisir le camp du bien ou le camp du mal, sans conséquences autres que pratiques, les 2 camps étant vus comme équilibrés. Le joueur se retrouvera donc à la fin du jeu, indistinctement sauveur de la galaxie ou nouvel empereur Sith, c'est à lui de "choisir" (grincements de dents).
- une tendance désespérée qui va d'un nihilisme presque moraliste comme la grande vague lovecraftienne (pour moi, équivalent d'une critique, en langage mythique, du désespoir d'un monde sans Dieu purement matérialiste) à un cynisme désabusé où la fin justifie tous les moyens, et les incantions de chef de gang/assassin/sniper/armée sur pattes se multiplient, dans des univers ou bien polythéistes, ou bien avec la vision distordue habituelle du catholicisme.
Au milieu de tout cela, beaucoup de jeux vraiment neutres et divertissants (mais aussi dans le sens pascalien du terme !), de vraies perles (trop rares, mais pas tant que cela), et des efforts louables pour intrduire le Christ (de façon cachée (Tolkien, Lewis) ou plus explicite (je salue l'effort dans ce sens de Michael Dor)).
Et parler de neutralité des jeunes (et moins jeunes) qui sont nourris ainsi est illusoire : Illitch et Ellul, mais bien d'autres aussi ont des critiques tout à fait fondées et qui s'appliquent ici. (N'évoquons même pas la problématique des métaux rares vis-à-vis de l'informatique).
A l'heure actuelle, mon amour des récits et de l'eucatastrophe m'empêche de simplifier ma vie sur ces aspects-là, mais je trouve leurs reproches justes.
Je ne suis pas inquiet. Comme Chesterton l'a dit, en continuant ainsi, "nous finirons où le paganisme a fini. Je ne veux pas dire que nous finirons par la destruction. Je veux dire que nous finirons par le christianisme."
Mais pour cela, il nous revient d'être les lumières qui permettent la transmission, et d'éclairer nos frères en ré-investissant le monde de la culture. Pas facile ! Passionnant cependant.
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Écrit par : Charles-Marie / | 23/02/2015

HOLLYWOODIEN

> Sur le comportement des nouveaux terroristes et profanateurs, un paragraphe de Mgr Yousif-Thomas Mirkis :
"Leur nouveau message est hollywoodien. Ils utilisent YouTube de façon sophistiquée pour l’Occident, pour terroriser les gens. C’est un peu la même méthode chez tous les terroristes qu’ils soient musulmans ou non. L’EI est composé de gens entre 20 et 25 ans, dont 5 000 Européens qui ont passé leur vie dans les banlieues ici ou ailleurs et sont imprégnés de films qui sont à la limite entre le réel et l’irréel."
En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2015/04/25/avant-l-irak-etait-une-vraie-mosaique-aux-couleurs-multiples_4622792_3218.html#5qghqkdrX6ZXd7KS.99
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Écrit par : Pierre Huet / | 26/04/2015

quelques réflexions et souvenirs en vrac :

> -je me souviens de gamins qui avaient profané une tombe ; leur explication avait été : "on voulait voir des morts."
nous sommes ici devant un phénomène commun de fascination pour le caché, ajouté à l'intérêt pour la mort fréquent chez les adolescents et qui est aujourd'hui accru jusqu'à devenir une fascination par le fait que notre époque la cache trop.
Autre question : cette profanation avait eu lieu en pleine nuit: que faisaient ces gamins de 13/14 ans dehors à cette heure ?

-je me souviens d'une interview d'un jeune adulte qui témoignait dans les collèges ; il sortait de nombreuses années adolescentes très difficiles commencées à faire du spiritisme .
Il racontait qu'il s'était peu à peu enfoncé dans ces trucs-là et témoignait : "au bout de quelques années, je me mettais en colère dès que je voyais le moindre symbole religieux et surtout chrétien. Pourtant je ne connaissais rien à cette religion"
Il racontait qu'il y avait eu entre eux une émulation, des sortes de concours à qui aurait la scarification la plus grave, à qui renverserait le plus de fleurs dans les cimetières à qui urinerait sur les tombes et puis c'est allé jusqu'à casser des croix.

Et toujours la même réflexion (je cite de mémoire) : "au début on faisait ça pour s'éclater, pour appartenir à un groupe ***; au début, personne ne pensait aux dégradations"
***j'ajouterais : au début on faisait ça pour avoir l'impression d'exister car ils ont tous une chose en commun : ils sont seuls avec eux-mêmes (et très attachants).
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Écrit par : E Levavasseur / | 27/04/2015

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